Discussion 01 - sujet
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Discussion proposée 01
Hier
Oui, ils ont bien trimé les petits ânes corses ainsi que leurs maîtres aux siècles passés et comme nous le disait Petru Ciavatti dans son " Esquisse de la vie en Corse il y a cent ans " (*),
" Cette vie d' il y a cent ans, bien entendu, je ne l'ai pas connue, mais j'en ai entendu parler très souvent par mes grands-parents d'abord, par mes parents ensuite et par quelques personnes de leur génération aussi, qui ne se faisaient guère prier pour raconter ce qui avait été leur existence - et dans les moindres détails -cette vie qui nous paraîtrait bien dure, voire impossible même, aujourd'hui, si nous devions, pour quelque cause que ce soit nous y astreindre à nouveau. Et nous nous plaignons, et nous osons contester et revendiquer sans cesse, alors que les mots : fatigue, peine, effort, travail, misère, ont perdu à peu près tous leurs sens, la machine ayant aidé à tout atténuer, sinon à aplanir et remplacer, comme l'ont, par ailleurs, aussi perdu des mots comme : bonheur, gaieté, joie, abondance, solidarité." (Petru Ciavatti)
A l'occasion, nos anciens nous en parlent encore, non pour l'avoir vécue eux-mêmes cette vie de labeur et de précarité, mais pour en avoir entendu parler par leurs parents. et même au début du siècle dernier, combien de Corses se sont expatriés et ont emmigré pour fuir la pénibilité et la misère du quotidien ?
A memoria, u ricurdiziu,... certes c'est apprendre d'où l'on vient pour savoir qui l'on est, ce sont les racines d'une identité; Mais, à mon sens, il faut se garder d'en faire, comme parfois, soit un "passéisme" stérile, soit l'objet de quelque folklore à usage touristique.
Le souvenir d'hier ne doit-il pas avant tout être la source où nous pouvons puiser en nous-mêmes des valeurs que notre monde actuel a parfois oubliées ou méprisées ?
Aujourd'hui
A en croire certains d'entre nous, la Corse d'aujourd'hui, donc notre Corse, est en voie de paupériosation et nous avons même lu d'aucuns dire qu'elle faisait déjà partie du "tiers monde".
A voir les véhicules ostentatoires, gros consommateurs d'énergie, sillonner les rues d'Ajaccio, j'ai quelque difficulté à le penser. Et, à l'entrée des lycées, nos jeunes ne me semblent pas particulièrement déguenillés et nécessiteux.
Toutefois il est bien vrai a vita hè dura oghji chi hè oghji, dans ce monde du "chacun-pour-soi" mais nullement comparable à ce qu'a connu et vécu la Corse de jadis. Oui, ici comme ailleurs dans la France d'aujourd'hui, les loyers sont exorbitants, en ville et ailleurs, et le travail ne vient pas de lui-même frapper à votre porte.
Mais, de même, je dirai oui, il est vrai, quant à une forme de "tiers-mondialisation" des mentalités qui voit affluer et se concenter vers les grandes agglomérations une population d'origine paysanne, déracinée et désorientée, à la recherche d'un mieux-vivre hypothétique comme cela fut l'effet produit, en Afrique, par la déstructuration de la société traditionnelle provoquée par la colonisation. Mais, quand dans les villages corses, je vois tant de maisons à l'abandon, souvent séculaires, quand je constate que le maquis a envahi toutes ces terres que nos arrières grands-parents cultivaient encore, je me demande, moi aussi, si le mal d'aujourd'hui ne vient pas essentiellement d'ailleurs, si la Corse ne se laisse pas aller vers trop de facilité, trop d'attente de ce qui pourrait lui être octroyé, donné gracieusement et si elle ne se complait pas dans le "recevoir" plutôt que de faire l'effort du "stantà à sò vita", du "stantà u sò pane", avec fierté, par soi-même, et, par là, enfin acquérir, par elle-même sa véritable autonomie de Corse adulte.
Le déficit de la Corse, la précarité d'aujourd'hui, ne sont-ils pas davantage en elle, pour ne pas avoir su faire perdurer les valeurs qui firent la force de ses disparus et la Corse de demain n'est-elle pas avant tout ce que les Corses eux-mêmes en feront ?
Et demain...?
Quant à moi, j'espère que ce proverbe de nos anciens a toutefois conservé suffisemment de résonnance dans la campagne corse...
" l' avvena hè for di noi,
ma a noscia vuluntà hè in noi.
Pà dì a soia
apre qui-sottu